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Les 343 salauds : attention, la société du spectacle nuit gravement à la liberté.

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Alors voilà, des hommes qui s’invitent, à leur façon, dans un débat important. 343 salauds sur la ligne de départ, on comptera déjà un bouffon en moins sur la ligne d’arrivée.

Tout, dans cette intervention, est la marque d’un crétinisme sans bornes, la référence au combat pour la légalisation de l’avortement, qui met sur un même plan deux questions de société différentes, et qui assimile la prise de risque des « salauds », qui est à peu près comparable au risque pris par un clown quand il se jette dans une bassine du haut d’une chaise, à la prise de risque des « salopes », qui était réelle, comparable à celle que prend l’employée qui porte plainte contre le patron un peu trop proche.

Autre marque de crétinisme, mettre en avant un « droit à », celui de payer pour des services sexuels, alors que le problème est celui du « droit de », que réclament certains collectifs de prostituées, d’exercer leur métier légalement et en sécurité, un droit qu’il n’y a aucune raison de leur refuser. Ce droit, on peut argumenter pour, surtout si on est libéral.

C’est pour cette raison que Morgane Merteuil, la secrétaire générale du STRASS, le syndicat du travail sexuel, a déclaré à juste titre que ces débiles « feraient mieux de fermer leur gueule », et a signé une tribune sur le site de l’association en réponse aux lapins-crétins. En effet, si la seule ambition est de permettre aux clients de se procurer un service, c’est-à-dire de favoriser la demande, alors on va être moins regardant sur les conditions de l’offre, et, notamment, si l’offre est le fait de la personne qui rend effectivement le service. La pénalisation est surtout un mal en ce que l’on voit mal comment un service qui fait l’objet d’une pénalisation pourrait être rendu sans pénaliser de ce fait la personne qui rend ce service.

Mais les salauds, en parlant de cette manière, font croire que le seul problème, c’est d’empêcher des beaufs de « se taper des putes », alors que le problème n’est pas là. Il faut donc demander aux travailleuses et travailleurs du sexe ce qu’ils en pensent, et ce qu’il faudrait faire, à leur avis, pour leur permettre de travailler tranquillement, sans être forcés par la loi de la rue de recourir à des intérmédiaires… douteux.

 

C’est tout de même étonnant que l’actrice Brigitte Lahaie qui a pris position contre la pénalisation des clients, et ce non pas pour garantir un « droit à », mais plutôt le « droit de… », ait vu ainsi sa parole mise de côté, étouffée. Ce n’est pas un hasard, tant que c’est la bien-pensance, l’émotion et le dogmatisme qui règnent en maître sur ce débat cirque médiatique, en assimilant toute forme de prostitution à ce qu’il y a de plus sordide, et en ressassant toujours les mêmes stupidités.

Les 343 salauds donnent des armes aux abolitionnistes, et à l’état pour rendre la condition des femmes qui exercent ce métier encore pire, car on le sait, la prohibition, l’interdiction dans ce domaine, c’est justement ce qui nuit aux femmes, et pas seulement, car la prostitution n’est pas un métier réservé aux femmes, et la clientèle n’est pas exclusivement masculine. Ce qui permettrait d’éloigner les femmes et les hommes, les travestis, les transsexuels qui offrent des services sexuels payants des réseaux criminels, c’est que ce métier soit enfin légalisé vraiment et reconnu.

Ce que veulent des personnes comme Najat Vallaud-Belkacem, c’est normer la sexualité. C’est avoir leur mot à dire sur ce que la sexualité doit être, sur la manière dont on doit se servir de son corps.

Cela ne gêne pas nos abolitionnistes de « se servir du corps » des ouvriers du Bangladesh pour acheter des fringues à moindre prix. Cela ne les gêne pas non plus de « se servir du corps » des ouvriers qui travaillent dans les abattoirs pour disposer des corps d’autres êtres vivants… Cela ne les gêne pas que des jeunes adultes abolissent leurs fonctions cérébrales en tant que télé-opérateurs pendant toute une journée…

Mais dés qu’il s’agit de permettre à des êtres humains de se servir librement de ce qui n’appartient qu’à eux, à savoir leur vagin, leur anus, leur bitte, leur langue, leur bouche, leurs mains, pour vendre des services sexuels, alors non, trois fois non, il faut tout faire pour que ce métier soit risqué, déplaisant, sordide, car ce que nous voulons tous, c’est évident, ce sont des êtres humains qui soient incapable de séparer le cul de l’affectivité; nous voulons, c’est évident, sacraliser les organes sexuels, et culpabiliser celles et ceux qui s’en servent pour gagner leur vie.

Car nous luttons contre la « marchandisation des corps » et la « mondialisation néo-libérale », en route ensemble vers un avenir radieux où il y aura des lois pour bientôt être sûr qu’à chaque fois que l’on fait zizi-zizi, zizi-zézette, ou zézette-zézette, c’est dans le cadre défini par l’état.

Najat Vallaud-Belkacem, Frigide Barjot, même puritanisme, même combat!

Recommandation:

Au lieu de prostitution, essayer de parler de « services sexuels payants ». Et ne parlez plus de prostitué(e)s, mais de travailleurs et travailleuses du sexe.

A voir:

Le remarquable épisode 25, de la non moins remarquable série télévisée Borgen, où cette question est traitée avec intelligence, discernement et équilibre…

A lire:

un très bon billet, par Frédéric Joignot, qui explique les tenants et les aboutissants de la pénalisation du client.